![]() carte de répartition (cliquez sur la carte) |
Hormis les quelques rares individus
qui auraient choisi nos régions pour y passer l'été,
les premiers grèbes jougris, en général des
juvéniles, apparaissent en Europe de l'Ouest dès
le mois d'août. La migration de cette espèce est-européenne
se déroule jusqu'en novembre et des oiseaux, le plus souvent
isolés ou en très petite troupe, font des apparitions
sur les plans d'eau de l'intérieur des terres mais plus
volontiers en mer sur les franges littorales de la Mer du Nord
au sud de la Bretagne. Hormis le lac Léman, l'hivernage
est essentiellement maritime mais ne concerne que quelques dizaines
d'individus pour l'ensemble de nos quatre pays francophones. Le
reour vers leurs pays d'origine a lieu de mars à mai, et
des migrateurs, encore plus rares qu'à l'automne, peuvent
être notés çà et là.
La nidification débute en avril-mai et la ponte de 4 à
5 ufs en moyenne a lieu fin mai ou durant le mois de juin. Leur
incubation dure 22 à 23 jours puis les poussins nidifuges
accompagnent leurs parents pendant environ 3 mois avant leur émancipation
définitive, la faculté de voler étant acquise
vers l'âge de 2 mois et demi.
Le grèbe jougris est un
hivernant rare mais régulier dans la moitié nord
de la France, en Belgique et sur les lacs suisses. Les façades
maritimes de la Mer du Nord, de la Manche et de l'Atlantique retiennent
la majorité des hivernants mais les vastes lacs et plans
d'eau de l'intérieur des terres accueillent quelques individus
durant la mauvaise saison. Une cinquantaine de jougris sont dénombrés
sur le lac Léman chaque hiver, ce qui est énorme
comparé à la population hivernale française
qui n'excède pas la centaine d'oiseaux. Même les
petites gravières, pourvu qu'elles soient riches en poissons
et que leur surface ne gèle pas en hiver, peuvent héberger
un ou deux oiseaux pendant plusieurs mois d'affilée. Lors
de la migration automnale, qui, rappelons-le, débute très
tôt en août et s'étale jusqu'en novembre, les
chances de rencontre avec ce grèbe de taille moyenne sont
cependant plus grandes qu'au cur de l'hiver.
Le grèbe jougris est un nicheur et un estivant rare dans
nos pays. En France, la dernière nidification connue remonte
à 1994 où 1 couple a élevé 5 jeunes
dans le département de la Seine-et-Marne. D'autres cas
de nidification ont eu lieu en Argonne (1988) et dans l'Yonne
(1978). Des cas d'estivage sont régulièrement notés
dans le quart nord-est de la France, mais il s'agit le plus souvent
d'individus isolés.
Le grèbe jougris est un migrateur et un hivernant nettement plus maritime que le grèbe huppé. Lorsqu'il se pose sur un plan d'eau, il fréquente souvent les alentours de la digue, certainement parce qu'il s'agit de l'endroit où les petits poissons qu'il recherche se réunissent en grandes bandes. On l'observe moins fréquemment au centre d'un plan d'eau et sa recherche doit s'effectuer en priorité aux abords de la berge. Il aime également se promener entre les bateaux dans les ports, aussi bien maritimes que continentaux et ne dédaigne pas la compagnie des autres espèces de grèbes.
Lorsque j'ai débuté
en ornithologie, je me suis posé un nombre incalculable
de fois si le grèbe huppé que j'avais dans mes jumelles
n'était pas un grèbe jougris. Ceci jusqu'au jour
où je vis réellement un jougris. En fait il n'y
a guère de ressemblance, le jougris étant un petit
grèbe huppé au plumage sale et à la base
du bec jaune. En plumage hivernal, le cou, la poitrine et les
joues sont grisâtres, plus ou moins foncés, sans
jamais atteindre la blancheur éclatante du grèbe
huppé. Hormis sa taille plus faible, le jougris possède
également une silhouette moins élancée que
celle de son grand cousin.
En plumage nuptial, le jougris est, à l'instar de tous
les grèbes, un superbe oiseau dont la calotte noire et
les joues blanches contrastent fortement avec le cou brun-roux.
Malheureusement, faute de nidifications régulières
dans nos régions, ce type de plumage est rarement observé
en Europe de l'Ouest.
Dans nos régions, le grèbe jougris étant avant tout un hôte hivernal, il est plus que rare d'entendre le son de sa voix. En période nuptiale, il émet une sorte de glapissement probablement peu discret car décrit comme proche des cris du râle d'eau.
Sa rareté dans nos pays fait qu'il y a peu d'interférences avec l'homme. Néanmoins, comme tous les grèbes, il sait profiter des alevinages massifs dans les étangs de pêche et du développement des piscicultures qui lui procurent nombre de poissons en hiver.