Oiseau visible toute l'année sous nos latitudes, le grosbec cassenoyaux débute sa saison de reproduction assez tôt en février, mois où des ébauches de parades nuptiales peuvent même être notées à la mangeoire ou à ses abords. Cependant la construction du nid, en général sur un arbre mais parfois au cur d'un buisson, n'intervient qu'en avril. 5 à 6 ufs y sont déposés dont l'incubation dure 12 à 13 jours. L'envol a lieu deux semaines plus tard et est suivie de la dispersion de la famille car les adultes n'effectuent pas de seconde ponte. Un certain erratisme estival anime les déplacements de ces petits groupes relativement sédentaires, rejoints en octobre-novembre par les populations migratrices d'autres pays d'Europe centrale et du Nord. Certains hivers sont parfois témoins de véritables invasions de la part de cette espèce qui peut alors errer en bandes de plusieurs dizaines d'individus. L'instabilité dans le choix du territoire de reproduction ou d'hivernage et la fluctuation des effectifs sont deux caractéristiques des populations de grosbecs.
Le grosbec cassenoyaux est un
passereau répandu dans nos quatre pays avec des densités
variables et des effectifs fluctuants suivant les régions
et les années. Assez commun en Belgique, en Suisse, au
Luxembourg et dans une grande partie de la France, il reste un
nicheur rare dans toutes les régions littorales (Bretagne,
Languedoc-Roussillon, Provence,) ainsi que dans les Pyrénées,
la moitié sud des Alpes, le sud-est du Massif Central et
la Corse. Par contre, il niche de façon commune dans un
large quart Nord-Est de la France.
En fait cette répartition hétérogène
s'explique simplement par le fait que le grosbec cassenoyaux se
reproduit surtout dans les massifs forestiers de plaine et de
moyenne montagne, feuillus ou mixtes. Les plus fortes densités
de nicheurs sont relevées dans les régions où
la surface boisée est importante. Dans ces secteurs, il
colonise également les bois de petite taille ainsi que
les ripisylves, les vergers, les parcs urbains et les jardins
fortement arborés. La hêtraie est de loin son boisement
préféré. Il peut toutefois se reproduire
dans les buissons, construisant son nid à 1,50 mètres
seulement du sol.
La surprise est toujours de taille
pour celui qui ne s'attend pas à rencontrer un grosbec
cassenoyaux sur sa mangeoire où seuls quelques verdiers
bataillaient avec les mésanges pour la possession des lieux.
Nombreuses même sont les personnes qui ont cru avoir affaire
à un perroquet ! Sur la mangeoire, c'est incontestablement
lui le roi et les autres oiseaux ne cherchent guère à
se frotter à son bec impressionnant, pas plus les sittelles
que les verdiers. Si vous avez donc la chance d'accueillir un,
parfois plusieurs grosbecs à votre distributeur de graines
de tournesol bio, sachez apprécier ces moments car il y
a de grandes chances que vous ne l'observiez plus avant l'hiver
prochain.
En effet, autant ce type d'observation hivernale est aisé,
autant repérer et voir les grosbecs durant les beaux jours
nécessite une bonne connaissance de l'espèce qui
devient invisible au fur et à mesure que les feuilles poussent
aux sommets des grands arbres. Un peu comme le loriot, le grosbec
est un passereau de la canopée de nos forêts de feuillus
et il passe la moitié de l'année dans la partie
supérieure des arbres, descendant à terre uniquement
pour se nourrir. Parfois, si vous connaissez et arrivez à
mémoriser leurs cris de vol, métalliques et secs,
vous lèverez la tête pour voir passer haut au-dessus
de votre tête une bande de grosbecs, reconnaissables à
leurs bandes alaires translucides et à leur queue courte.
Au fur et à mesure de vos rencontres, vous vous rendrez
alors compte que le grosbec est un passereau forestier en fait
relativement commun qui n'a absolument pas déserté
la région à la belle saison.
Le grosbec cassenoyaux est avant tout granivore et vous vous en rendrez rapidement compte si l'un des ses représentants vient visiter votre mangeoire et se goinfre de graines de tournesol dont il remplit parfois son bec. Les autres graines font également partie de son régime, notamment les faines de hêtre et les samares des érables, frênes et charmes. Son qualificatif de cassenoyaux n'est pas usurpé car la force de son bec lui permet de briser entre ses deux mandibules des noyaux de toutes sortes, notamment ceux des cerises afin d'en libérer l'amande dont il raffole. Le grosbec se rencontre parfois dans les haies où il se nourrit de baies, non pas de l'enveloppe charnue du fruit, mais plutôt du noyau central ou des graines. Les insectes représentent comme chez tous les granivores une part importante de la nourriture des poussins.
Membre de la famille des fringilles,
le grosbec cassenoyaux en est leur plus gros représentant
dans nos régions d'Europe de l'Ouest. Hormis son bec puissant
et surdimensionné, son plumage bariolé ne permet
aucune erreur sur son identité. Mâle et femelle peuvent
se différencier car cette dernière possède
un plumage plus terne. Enfin, les jeunes de l'année arborent
un plumage moucheté également peu coloré
notamment au niveau de la tête où les parties noires
sont délavées.
En vol, par-dessus et surtout par-dessous, les ailes présentent
de larges barres alaires translucides et caractéristiques.
Contrairement à la majorité
des fringilles européens, le grosbec cassenoyaux est un
piètre chanteur qu'on imagine mal être un proche
cousin des pinsons, linottes et autres chardonnerets, tous excellents
musiciens.
En fait, le seul son qu'il émet de façon régulière
et qui permet de le repérer dans la frondaison des arbres
est son petit cri métallique, sec et peu sonore, qu'il
émet fréquemment en vol.
Le chant est tout aussi rudimentaire et peu développé,
grinçant et souvent émis en sourdine.
Le grosbec cassenoyaux sera peut-être
un visiteur de votre mangeoire hivernale mais ne sera jamais fidèle,
arrivant souvent en fin d'hiver, en janvier-février lorsqu'il
ne trouve plus rien à manger en forêt, et s'éclipsant
le premier au retour des beaux jours. Il accepte toutes sortes
de graines, mais montre, comme les autres fringilles, une nette
préférence pour le tournesol.
La nidification dans votre jardin est plus aléatoire sauf
si vous possédez un petit bois Il eut cependant fort bien
s'installer dans un buisson ou sur un arbre fruitier de votre
verger.
Bien qu'il soit à toute saison relativement farouche, le grosbec cassenoyaux n'a rien à craindre de l'homme dont il visite volontiers les jardins en hiver et les parcs urbains tout au long de l'année. C'est une espèce intégralement protégée par la loi, ce qui le protège désormais de ceux dont l'amour des oiseaux les réduit à les emprisonner dans des cages.